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Marguerite - Quand le mal-être nous dit bouge-toi !

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Quand l’hiver nous prive pendant plusieurs mois de soleil, le moral des humains tombe dans leurs bottes. Au-delà de cette petite dépression saisonnière se cachent parfois des blessures plus profondes. Il est temps de faire un grand ménage pour savoir ce que l’on veut être ou pas…

 

Être mal, triste, en colère, jaloux, agressif n’est jamais agréable… On voudrait parfois oublier toutes ces émotions désagréables comme par magie… Mais croyez votre Marguerite, le souffle magique du bonheur ne vient pas de l’extérieur et demande de travailler sur soi. Quand l’action ne suffit plus à camoufler les souffrances, prendre du temps pour partager, comprendre, trier, choisir, changer devient une nécessité… La souffrance qui terrasse nous dit parfois : regarde ce que tu ne peux plus supporter et bouge-toi !

UN EXEMPLE POUR COMPRENDRE

Mickaël, un copain de Gégé fait une sorte de déprime. Il est en colère tout le temps, il voit tout en noir. Lundi, il est venu à la ferme, Gégé n’était pas là. Alors, il s’est assis près de ma logette et s’est mis à me parler (mon silence forcé est peut-être une force ? Parlez à vos vaches, elles ne vous coupent pas la parole au moins !).
Fils, petit-fils, arrière-petit-fils d’agriculteurs, il s’est installé à tout juste 20 ans :
« L’agriculture coule dans mes veines depuis des générations » disait-il alors avec fierté             

« Produire, fairepousser, récolter, faire naître, faire grandir, faire produire et reproduire, c’est toute ma vie ! ».
Trop touchant, ce jeune homme passionné !

Depuis tout gamin, il se levait tôt et rentrait tard dès qu’il n’était pas à l’école. Il aidait son papa. Ça l’a rendu débrouillard, responsable, costaud, endurant, heureux et fier ! Son père et son grand-père parlaient de lui avec un certain orgueil tandis que sa soeur était plutôt l’intello.

Depuis, 20 ans ont passé, il vient d’avoir 40 ans et il a bossé dur sans se plaindre (enfin pas plus qu’un Français moyen ! Oh Marguerite !). Il a laissé tomber le rugby (risques de blessures trop importants), la guitare (plus d’énergie pour aller aux cours le soir).
Un jour, il a pris conscience qu’il jalousait ses copains qui avaient des week-ends tranquilles, qui partaient en vacances et gagnaient bien leur vie. Pour se rassurer, il s’est dit : « Moi, j’ai un capital, je suis mon propre patron ! Je suis libre, pas de chef pour me dire ce que je dois faire ! ». De temps à autre, il avait un doute... Libre de quoi ?
Le doute a grandi, insidieusement. « J’ai commencé à être agressif avec mes parents, ils m’énervaient, avec mes copains qui se sont lassés de m’entendre râler. Je ne sortais plus.Pas le temps, pas le courage, pas envie... Mais tu vois, Marguerite, ça s’est fait petit à petit... Plus j’en prenais conscience, plus je me détestais. » me racontait-il.
Et il poursuivait.

Son coeur se serrait un peu quand sa soeur, institutrice, était accueillie comme une princesse par ses parents quand elle revenait. « Julie revient, il faut qu’on finisse tôt ce soir ! ».
Il fulminait intérieurement, lui qui se battait pour rentrer plus tôt pour pouvoir manger avec sa famille depuis des mois, en vain. Ils auraient dû être contents pourtant ! se fustigeait-il.
Il avait mal au coeur de ne pas être invité à ces repas de « famille » quand Julie rentrait. C’est vrai, il mangeait tous les midis avec ses parents (ou plutôt ses associés ! Ils ne parlaient que boulot), pourquoi serait-il invité en week-end en plus !

Pour accroître son désarroi, son père qui l’incendiait, lui, dès qu’il avait ¼ d’heure de retard à la ferme, demandait alors gentiment à sa fille si elle n’était pas trop fatiguée ! Fatiguée ! En vacances toutes les 6-7 semaines. Lui qui n’était parti que 3 jours en 2 ans...
« C’est moche d’être jaloux, Marguerite » dit-il tristement.
« Pour me motiver, tout le monde me dit que j’ai la chance de reprendre la ferme alors qu’elle n’aurait que de l’argent : Pov petite fille riche ! » ajouta-t-il amèrement. « Ça me rend dingue quand je pense que j’ai eu le droit de racheter les parts au prix fort d’une ferme que j’ai fait prospérer depuis mon enfance par mon travail. Elle en aura un jour moitié alors qu’elle a passé son enfance le nez dans les livres ».

Il se prit la tête entre les mains, comme dégoûté de lui-même. « Je me déteste de penser cela, je suis empli de culpabilité et de colère. Si on m’avait dit que je serais un jour jaloux de ma soeur adorée ! Quel mauvais frère je fais ! »
Parce que vraiment, me dit-il, il adorait sa soeur : intelligente, drôle, tendre... La soeur parfaite qui avait sûrement beaucoup souffert à l’époque où il était le héros de sa famille. Alors, il se taisait.

Pourtant, il aurait tant à lui dire : sa passion qui s’épuise, ses relations familiales qui se dégradent, sa colère de porter le poids de l’Héritier, sa fatigue, sa solitude, son besoin d’être aimé, reconnu par ses parents, sa famille, lui-même...
« Tu sais ce que Julie a osé me dire ? » me demanda-t-il.

Elle lui avait dit comme ça, l’air de rien : « Je compte sur toi, l’honneur de la famille est entre tes mains avec la ferme. Tu es le plus compétent pour y arriver. Et puis, fais un effort, sois un peu gentil avec Papa ! Tu le connais, il n’est pas méchant. Sois moins agressif avec lui. Je ne te reconnais plus » ».
« Prends ça dans la gueule, Mike ! Elle qui ne supportait pas notre père plus de 3 heures avant de s’enfuir. Facile de donner des conseils quand on habite à 300 km ! Et qui va s’occuper d’eux deux quand ils seront vieux. Et la ferme qui tourne mal à cause d’un contexte économique pourri ! »

Il était agité et me dit qu’il avait envie de hurler sa frustration, sa colère, lui le chanceux qui devrait être débordant de gratitude qu’il détestait l’homme qu’il était devenu au fil des années...
Et il devrait dire MERCI !

« Tu vois Marguerite, je suis épuisé, je ne sais plus qui est cet homme qui habite mon corps. Je ne m’aime pas beaucoup. Je me suis perdu ». Il s’est mis à pleurer doucement.
J’ai posé ma tête contre sa cuisse et j’ai attendu. Il m’a caressée un moment et s’est essuyé les yeux.

« Ça m’a fait du bien de te dire tout ça ! Et je sais que je pourrais regarder les choses sous un autre angle : cajoler mes enfants quand je rentre, sourire quand mon père râle car il est là, dire merci à maman de prendre soin de moi, regarder mes vaches qui chaque jour donnent le meilleur d’elles-mêmes pour moi (oui !), apprécier l’odeur du regain, le lever de soleil nouveau chaque matin. Je n’y arrive pas... Plus mes proches essaient de m’aider plus je me sens nul ! J’ai besoin d’autre chose... »
Gégé est arrivé et a dit « Tu parles tout seul, Mike ? ».

Puis il m’a aperçue, « Non ! Je vois ! Tu as ressenti aussi la magie de Marguerite ? On dirait qu’elle va parler. »
« N’importe quoi ! Ce n’est qu’une vache ! » répondit Mickaël en riant.

J’allais me révolter quand il s’est retourné et m’a fait un clin d’oeil complice en chuchotant :    « Merci Marguerite ! »

 

DÉBRIEF DE MARGUERITE :

Eh bien…C’est l’histoire de Mickaël à la ferme mais aussi celle de la mère de famille ou du directeur d’une entreprise de mécanique ou de vous qui me lisez…

Ces crises existentielles arrivent dans la vie des humains de façon cyclique, plus ou moins intenses…

C’est l’éclairage que l’on met sur notre vie qui change… Petit à petit, ce qui avait du sens en a moins…

Les barreaux de la cage dorée (plus ou moins dorée d’ailleurs) apparaissent…

La porte noire de l’histoire de la dernière fois : vous avez peur…

Les non-dits, les rancoeurs, les injustices, le manque de reconnaissance prennent de plus en plus de place… Tournés vers le passé, englués dans la souffrance du présent, le futur ne peut pas être attrayant, on ne le voit même pas vraiment… Impuissant à agir, on rumine et comme on rumine on s’enfonce… Vos relations se dégradent… On se sent encore plus mal…

Et tous ces gens qui vous disent que vous avez tout pour être heureux ! Ça vous fait sentir encore plus mal, coupable de ne pas apprécier toutes ces choses trop géniales qui vous arrivent ! Tu parles ! La solitude est encore plus grande…

Petit à petit, on ne parvient plus à agir et quand on agit, on a l’impression que rien ne marche…
Alors me direz-vous, que faire ?

Déjà, se dire que de vivre ces crises est souvent nécessaire pour se libérer de chaines qui nous empêchent d’avancer. C’est normal !
La souffrance nous indique qu’il est temps d’agir pour changer les choses. L’accueillir permet d’avancer et de pas basculer vers la dépression : que dit-elle à Mickaël ?

    Que ses priorités ont changé ;
    Qu’il a besoin de faire évoluer certaines croyances qui l’empêchent de changer ;
    Qu’il a besoin de prendre du temps pour lui, pour se reposer, se divertir ;
    Qu’il a besoin deretrouver du sens à son métier ;
    Qu’il a besoin de dire non à certaines choses ;
    Qu’il a besoin de savoir qui il est en dehors du regard de sa famille ;
    Qu’il a besoin de revisiter ses réussites ;
    Qu’il a besoin de revisiter ses valeurs et comment il les respecte ;
    Qu’il a besoin d’être écouté et accueilli ;
    Qu’il a besoin de s’exprimer ;
    Qu’il a besoin de dire ce qu’il ressent et d’accepter d’être humain ;
    Qu’il a besoin de s’intéresser aux autres sans se comparer ;
    Qu’il peut juste imaginer qu’est ce qui changerait si ça allait un peu mieux ;
    Qu’il aurait intérêt à stopper ses pensées négatives (ruminations) en pratiquant la méditation (1/4 d’h par jour) ;
    Qu’il peut se faire accompagner pour faire tout ça ou pas…

Et plein d’autres choses encore…

APRÈS QUELQUES MOIS :

Mickaël a décidé de faire un stage qui s’appelle « donner un second souffle à sa vie professionnelle ». 6 jours pour réfléchir avant d’agir…Rien à voir avec une thérapie enfin, il n’en a jamais fait alors il ne sait pas ! (Mais si ! Il a eu la Marguerite thérapie ! Ingrat !).

Ils étaient 7, tous différents, pas de comparaison possible. Il s’est déjà trouvé changé en faisant ce choix. Enfin s’autoriser à prendre soin de lui. C’était le premier petit pas.

Et puis, il en a parlé à ses parents et à sa soeur. Bizarrement, ils ont tous été soulagés : « ça fait des mois qu’on voit que tu vas mal et que ça nous inquiète, on est content que tu réagisses. » a dit sa mère. Ce qu’il vivait à l’intérieur se voyait donc plus qu’il ne le croyait. Il avait pourtant cru réussir à bien camoufler sa souffrance.

A la formation, il a pu parler de ce qui le faisait venir et a apprécié de pouvoir aider les autres à avancer… Il a retravaillé son histoire de vie et ses réussites…
Il a réfléchi à sa vie rêvée et à ses valeurs… Il a fait face à ses freins et a inventé son futur... Il a mis en place des petits changements… A découvert qu’il pouvait choisir… Un vrai bol d’air…

 

Dicton de Marguerite :

« Accepte ce que tu ne peux pas changer, change ce que tu ne peux pas accepter et aie la sagesse de distinguer l’un de l’autre.»